Lundi 23 février 1 23 /02 /Fév 09:01
 

Les voici attablés là :

Une table ronde dans un recoin calme et discret. Une table trop vaste à son goût. Et au centre, un bouquet d'orchidées.

Ils ne se sont pas moqués de moi. — Pensa-t-il.

Elles sont vraiment magnifiques ! — Dit-elle en se levant.

Elle se pencha vers lui et le remercia d'un baiser humide et frais. Elle se rassit. La tête inclinée, elle lui sourit tendrement.

Oui ! Mais elles dérobent la danse des flammes des chandelles dans les yeux d'or de la douce Déborah qui me fait rêver.

Dit-il en repoussant doucement le vase vers sa gauche.

Je t'aime ! — Articulèrent les lèvres vermeilles de sa belle.

Il lui prit sa main gauche. Il sortit un petit écrin de sa poche et le déposa au creux de la paume ouverte en disant :

— Joyeux anniversaire d'amour ! Mon Amour. —

Il vit les joues de Déborah rosir et les pommettes s'empourprer...

Et ça le fit bander (physiquement)…

La soirée se poursuivit toute entière idyllique, toute remplie de caresses chastes, de « Je t'aime - Moi aussi », entrecoupés de plats royaux juste becquetés, arrosés de vins capiteux à peine dégustés... Ce sont des gourmets, pas des goinfres : leurs silhouettes ne démentent pas.

Ils s'aiment : c'est leurs yeux qui le déclarent le mieux…

Puis la nuit s'avança en musique : l'heure où l'on se lève pour danser.

Déborah prit la main de Marcel... Et plongea dans le bleu de ses yeux...

Puis elle se leva et approcha sa chaise de la sienne. Elle posa sa main sur la cuisse de Marcel et regarda la piste où les couples dansaient ; danses de salon en tango sulfureux, ou biguine « colé séré » qui lui firent envie.

Marcel pesta intérieurement, sinon il aurait pleuré car il sait trop comme elle affectionne de se défoncer sur ces musiques délurées : l'un des exercices favoris de Déborah. Mais au lieu de conduire ses déhanchements qui l'émoustillent :

Je suis là, tel un emplâtre ! — Pensa-t-il. Et ça ne le fit pas rire…

En regardant les couples danser, c'est le jour de leur mariage qu'ils revoient en ce moment. Chacun ses petites images dans sa petite tête…

Vingt cinq ans ! Vingt cinq jours !

Vingt cinq ans comme vingt cinq jours !

De ces jours au fil des ans, ils en ont gagné de l'expérience ; l’expérience du Monde et de la Vie en se préservant de leurs excentricités prêtant peu d'attention aux histoires et traditions populaires. Et, sur certains points, plus superficiels encore, ils restent aussi naïfs qu'au premier jour.

— Tu te souviens de notre nuit de noces ? — Demanda Déborah.

Comme maintenant ! — Répondit-il. Leurs doigts s’enlacèrent fort.

— Comme tu étais doux... Regarde ! J'en frissonne encore. —

J'avais une trouille ! La peur que je ne pourrais jamais... La vague sensation que ton intimité avait disparue : je voyais rien. —

— C'était bon ! Juste mes lèvres enveloppant ton gland... —

— Et le soleil levant dans tes yeux... —

— Et quand tu as embrassé mon clitoris ? —

— J'en avais très envie. —

— Savais-tu que pour la première fois je jouissais à m'évanouir ? —

J'ai eu peur ! Tes jambes me serraient si fort. Et toi, tu savais qu'il a fallu presque un an pour que je sois sûr que tu aimais ? —

Non. Ce n'est pas vrai ! — S’étonna réellement Déborah.

Je te jure. — Jura-t-il.

Tu te souviens quand t’es tout entré en moi ? — Divergea-t-elle.

— Oui. Je voyais tes yeux humides et je n'osais pas bouger. —

— Alors selon toi, quand avons-nous fait l'amour la première fois ? —

— Le jour où t'as crié. Je suis sorti et j'ai vu mon sexe rougi de toi. —

Ça oui. Mais c'était quel jour ? — Insista-t-elle.

Le mercredi. — Répondit Marcel sûr de lui.

Non le jeudi. — Corrigea-t-elle, sûre et certaine.

T'es sûre? — Douta-t-il.

— Absolument ! —

Ah bon ! — Marcel se gifla en ajoutant : Bien sûr : le mercredi c'est le jour des enfants ! —

Ce que, ravivant leur bonne humeur, ils se resservirent du champagne et trinquèrent à nouveau... Se repassant le film de leur vie en riant gaiement... Finalement, leur place était parfaite, puisqu'ils pouvaient parler sans que Décibels les ennuient trop...

Pourquoi aura-t-il fallu dix ans avant que nos parents admettent ce que nous affirmions : notre amour aura raison de votre haine ?

Dit-il essoufflé, comme si le souvenir de cette bataille l'avait épuisé.

Jamais le bonheur des uns, ne remplace le malheur des autres —

Répliqua Déborah avant que le souffle de Marcel ait eu fini de mourir.

Ah ! Je ne comprends pas. — Avoua-t-il

Les divorces ! Mon frère, ta sœur… Et les autres « bons partis », ça a trotté dans leur tête ! Précisa-t-elle d'un ton déterminé.

— Peut-être. Mais ils auraient pu aussi bien nous haïr plus... —

Ils ne nous aiment pas : ils se sont pliés à notre raison par absence d'argument mais ils ne comprennent pas ce qui nous lie si fort. — Expliqua Déborah.

Mais c'est simple : il n'y a rien à comprendre ! — Réfuta Marcel.

— Les préjugés Marcel... Qu’on n’ait pas d'enfants les interpelle... —

— D'un couple sans enfant ils déduisent : ils ne font pas l'amour. —

Peut-être, ou peut-être pas. Mais plus sûrement, que ce raccourci doit être arrangeant. — Compléta Déborah.

Ça te gêne... — Suspendit Marcel cherchant ses mots.

Ils pensent ce qu'ils veulent : ça m'est égal. — Se défendit-elle.

Non : ça te gêne qu’on n’ait pas d'enfant ? — Demanda-t-il.

— Ce n'est ni le verbe ni la forme adéquats... Mon amour ! —

Boum ! Sur le cul Marcel ! — Concéda Marcel.

Tu n'as jamais demandé si je désirais un enfant... Et tu n'as jamais dit que ça te ferait plaisir d'en avoir un. — Introduisit-elle.

— Nous n'en avons jamais parlé parce que c'était à toi de décider ; c'est ton corps qui l'aurait porté, c'est toi qui en aurais souffert... Si t’avais dit en rentrant, un soir : « j'attends un enfant. »… Moi, j'aurais admis ce choix et je t'aurais dit : « merci mon Amour ! » —

Moi décider ? J'ai longtemps attendu que tu me demandes un enfant ! Surtout, je ne voulais pas que tu puisses me reprocher de te l'avoir volé... — Dit Déborah

— Tu désires un enfant ? — Demanda-t-il.

— Non Marcel ! Je ne désire pas d'enfant et c'est trop tard pour. —

— Tu aurais aimé avoir un enfant que j'aurais souhaité ? —

— J'aurais adoré l'enfant que je redoutais que tu me réclames. —

— Si nous en avions parlé, il y a quinze ans, t'aurais dit quoi ? —

— Pourquoi nous n'en avons pas parlé ? —

— Pourquoi ? Sûrement parce que les discours tuent l'amour. —

— Tu regrettes ? —

— Non ! Tu te débines ma chérie ? Dis-moi. Par exemple ... —

Marcel se tut : on l’aurait cru sans argument, sans arme capable d'ébranler les retranchements de Déborah.

Oui ? — Déborah un sourire malicieux aux lèvres planta ses yeux dorés, yeux de chatte à l'affût, dans ceux de Marcel, bleu pâles de cécité. Mais il voyait bien Marcel. Et cette attitude l'excita, « Chauffe Marcel ! »

Nous nous connaissons depuis notre enfance. La première fois où nous avons flirté, tu avais dix ans. Et douze ans quand on s’est montré nus et que tu m'a offert la vue de tes seins naissants ? A treize ans, tu m'as dévoilé ton premier sang de femme. Et je t'ai vue grandir et t'embellir. Pour tes quinze ans, je caressais ton corps comme aujourd'hui. Tu ne m'as rien caché de toi... Mais des hommes, tu ne connais que moi... —

— Comme toi des femmes : tu n'as caressé que mon corps, tu n’as cajolé que mes seins, ta langue n’a excité que mes secrets : tu n’as vibré que par mes frissons, n'est-ce pas ? —

Mon amour ! Je ne regrette rien et... — S’excusa Marcel.

Moi non plus. — Répliqua-t-elle sèchement.

Ce n'est pas ce que je voulais dire... — S’excusa-t-il de nouveau.

Je sais ce que tu allais dire et ça n'a aucun intérêt : je n'ai pas d'autre désir que toi... Et aussi... Je ne te l'ai jamais dit mais je n'aime pas quand les femmes te dévisagent dans la rue ... —

— Des femmes qui me regardent ? Sûrement pas par envie ! —

Si ! Leurs yeux ne trompent pas. Et ça, ça m'irrite sérieusement. — S’irrita-t-elle très vigoureusement.

T'es jalouse de quoi ? — S’inquiéta Marcel.

— Ce n'est pas ça. Je déteste la convoitise : c'est malsain ! —

Vingt cinq septembre 1999 s'enfuit.

Ils sont assis là, se dévorant des yeux.

Vingt cinq septembre 1999 est mort.

Ce sont les seuls assis... Nombreux sont sortis, les rares autres se déhanchent jusqu’à l'indécence. Mais eux deux ne voient rien de tout ça. Ils rêvent. Toujours et Encore. Ou, encore comme toujours. Ils rêvent comme les amants qui sont étrangers au monde environnant.

Tu te fais des idées : je ne suis pas Apollon. — Arrondit Marcel.

Apollon n'est rien : toi t'es charnel et vivant. — Soutint-t-elle.

On va pas sottiser à sot attiser. — Recommença à jouer, Marcel.

Drôle de sobriquet pour un sot à briquer. — Rit Déborah.

Non ! Un sot à briquet est un sot allumé. — Plaisanta-t-il.

Et de sot en saut marqué de leur sceau à remplir plus d'un seau, ils se relanceraient sur l'orbite à calembour jusqu'à ce qu'ils décident de larguer les amarres à la marée, et de jeter le carré (ne pas confondre avec : »Se marrer dans la mare à carène », Sinon, on risque de se noyer en mer dans de l’eau douce)... Si, cet homme ci, si cet homme, là, cet homme, la trentaine environ, s'approchant de leur table n’avait demandé à Marcel :

— V’permettez m’sieur qu’j'invit’ mad’zêle. —

Madame ! — Coupa fort sèchement Déborah.

Le type se figea : il les regarda décontenancé...

— Monsieur t'invite gentiment à danser. Ça ne te fait pas plaisir ? —

Adoucit Marcel.

Tu ne danses pas, moi non plus - Confirma Déborah de son ton antérieur.

Elle dévisagea l'autre et cibla son pif : paf ! Deux balles d’or en pleine poire ! L’autre, comme un emplâtre : toujours aussi statue figée. Sauf que lui, à la différence de Marcel, paraissait l'être tout entier.

J’peux pas danser mais t'as pas à te priver ! — Arrondit Marcel.

Non merci ! — Expliqua Déborah au « David à Michel Ange ».

Il n'y a pas de mal à danser. Vas-y. Tiens ! ça me fait plaisir ! —

Déborah scruta au fond des yeux de Marcel.

Mais impuissante à y discerner un réel plaisir, elle minauda à son oreille :

— Vraiment ! Tu veux bien ? Juste deux petites alors ! —

C'est comme tu le sens.— Soufflèrent les lèvres de Marcel sur la joue de sa belle...

Elle est vraiment belle ma femme - Pensa-t-il en l'admirant.

Elle est envoûtante quand elle roule et glisse ainsi. Le tango ? C’est pour elle qu'il a dû être créé ! — Se persuada Marcel.

Comme elle danse, souple et légère. Il traîne son partenaire. —

Et il sourit. Non de la scène mais de la réflexion courant dans sa tête :

C'est pas moi qu'elles regardent les femmes dans la rue : c'est elle ! « Que peux foutre une femme aussi belle avec un schnock pareil » C'est ça qu'elles pensent ces femmes, elles me toisent : un schnock ! Déborah ? ça fait vingt-ans qu'elle a vingt-ans, tandis que moi... Moi et mes cheveux gris, on ne trompe personne. Les femmes nous croisant main dans la main ? ça les écœure : « Une jeunesse, aussi belle, avec ce vieux ! » C'est amoral : c’est insolent... C’est licencieux et honteux ! —Pensa-t-il, attristé.

Et il aurait bien pu en pleurer si cette femme ci, cette femme tanguant des hanches, ne s'était pas approchée si près, tout près, là, pour demander :

— Voulez-vous bien m'inviter à danser ce tango ? —

Pardon ? - Répondit-il (croyant plutôt qu'il avait mal entendu).

Elle se répéta. Et il avait bien entendu : au temps, go ! Et à l'heurt de l’air (dans ses tympans), sur l’heure et sans y regarder montrant son plâtre handicapeur, il s'excusa d'un geste des bras.

Oh ! C'est pas de veine ! — Dit-elle.

C'est la vie ! — Souffla-t-il nonchalamment.

Je ne vous dérange pas, je peux m'asseoir. — Joignant le geste au toupet.

Il la laissa faire et ne dit rien, préférant porter son attention admirative à sa femme plutôt qu'à la voisine d'invasion, qui de plus, paraissait bavarde.

— Je vous ai jamais vu ici, c'est la première fois que vous venez ! —

Qu'est-ce ça peu lui foutre à cette curieuse. —  Muettisa-t-il.

C'est un ami qui vous a donné l'adresse ? — Insista-t-elle.

On cherchait un lieu agréable où fêter notre anniversaire de mariage. Le patron de ma femme a dit qu'ici c'était chic et sympa et que ça ne nous décevrait pas. — Choisit de débiter Marcel espérant qu'ainsi elle le lâcherait... Mais il comprit très vite que, non, qu'elle ne souhaitait pas le lâcher.

Vous trouvez que ça l'est ? — Le questionna-t-elle à son tour.

Ça va ! — Sur un ton voulant autant dire « oui » que « tire-toi »...

C'est votre femme qui danse avec mon ami ? — Demanda-t-elle.

Ah ! C'est votre ami ! — Souffla-t-il, suffoqué.

Elle est très belle votre femme ! — Dit-elle, flatteuse.

Oui ! — Et son esprit se remit à vagabonder… Petites causes, grands effets : tu ne veux pas être sauvage, tu crois même faire plaisir, tu penses : — C'est sans vraie conséquence. — Et après ? Après, tu te retrouves envahi... C'est pareil qu'avec l'autre vache : elle te demande :

Holà ! Juste un mot ! — Et pour te remercier, elle te casse le pied... Et avec ceux-ci, dieu seul sait où ça va nous mener...

Vous connaissez les salons ? — Elle l'avait fait tomber du plafond.

Vous dites ? — Qu'il dit. Perdu sur son nuage il n'avait rien compris.

Les salons, derrière la salle et la piste. — Précisa-t-elle.

Des salons ? — S’éberlua-t-il.

— Oui. Des salons de... —

Il ne l'écoutait plus et cherchait désespérément le regard de sa femme. Mais il ne voyait que son dos…

La piste se désertifiait. Il allait paniquer et... Ouf ! Enfin ! la musique s'arrêta. Déborah quitta son partenaire et revint vers Marcel.

Il la suit ? Normal, son amie est encore là ! - Constata-t-il.

Veux-tu rentrer ? — Demanda Déborah en embrassant Marcel.

Comme tu veux ! — Mais il vit qu'elle n'avait pas envie de rentrer.

Ça vous dirait : un salon ensemble ? — Tenta l'amie du danseur.

La vache, elle est obstinée. — Se dit Marcel.

Il regarda Déborah, espérant un « non merci ! » Comme tout à l'heure : aussi sec et froid. Cette fois-ci, il ne l’aurait pas forcée. Mais va savoir, comment les choses se dérangent parfois, car ce que n'osait entendre ni comprendre Marcel, ce qu'articulèrent les lèvres charnelles de Déborah, fut loin du refus catégorique tant espéré :

— Si c’est plus confortable que ces chaises, pourquoi pas. —

C'est pas comparable et c'est plus intime ! — Assura Obstinée.

Tu veux bien Chéri ! Hé ? — Susurra Déborah : toute en miel.

Tout ce que tu veux ma Douce. — Succomba Marcel.

* * * * *

A suivre
 

Pateric©

Par Pateric - Publié dans : Nouvelles - Communauté : Des Fantasmes par la Langue
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  • : 28/01/2009

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